LA SACRA DI SAN MICHELE
Ancien monastère bénédictin, la Sacra est souvent considérée comme une abbaye bien qu'elle ait des caractéristiques de basilique, en raison de sa fonction religieuse et de son architecture. Umberto Eco s’en est inspirée pour écrire « Le nom de la Rose ». La description de l'abbaye dans le roman correspond parfaitement à la Sacra. Pour citer Cinzia qui nous l'a fait découvrir, la Sacra domine le Val de Suse et au loin la ville de Turin, "comme une gardienne millénaire".
LA LIGNE DE SAINT MICHEL
Construite entre 983 et 987 après J.-C., cette abbaye, d'abord gardée par des moines bénédictins puis par la congrégation des pères rosminiens depuis 1837, est dédiée à l’Archange Michel.
Elle fait partie d’un long itinéraire de pèlerinage de plus de 2 000 km reliant le Mont-Saint-Michel en France au Monte Sant’Angelo dans les Pouilles.
La ligne sacrée de saint Michel, également appelée épée de l'archange saint Michel, est une ligne fictive qui met en évidence l'alignement de sept sites chrétiens consacrés à l'archange Michel.
C’est Charles Albert de Savoie qui a décidé en 1836 de restaurer ce monument après deux siècles d’abandon.
L'ESCALIER DES MORTS
L'accès à l'église se fait par l’escalier des morts, composé de 243 marches taillées dans la roche, dont la construction remonte à la moitié du XIIe siècle.
Cet escalier a reçu son nom après la découverte en 1936 de squelettes momifiés de moines dans une niche, qui furent ensuite placés dans un ossuaire en contrebas.
Une colonne de plus de 18 mètres soutient la structure au-dessus.
Arrivés au sommet du Grand Escalier des Morts, il faut franchir le Portail du Zodiaque (1128-1130), ainsi dénommé en raison des sculptures des douze signes du zodiaque présentes sur les jambages tournés vers l'escalier.
Une grande terrasse offre alors une vue imprenable sur le portail roman en pierre grise et verte qui mène à l’église, édifié au début du XIe siècle. Les battants de la porte en bois de noyer, réalisés en 1826, portent les armoiries de Saint Michel l’archange et un diable représenté sous les traits d'un serpent à visage humain.
TROIS STYLES ARCHITECTURAUX
La basilique romano-gothique a été construite et modifiée au fil des siècles, mêlant trois styles architecturaux : le style roman dans la partie absidale, orientée exactement où le soleil se lève le jour de la fête de Saint Michel le 29 septembre, le style roman de transition dans les deux arcades suivantes, présentant des colonnes à faisceaux et des arcs en ogive, et le style gothique dans la décoration de la grande fenêtre de l’abside centrale et des fenêtres des nefs latérales.
Il est difficile de dater précisément le début des travaux de construction de l’église, mais on pense qu'ils ont été lancés par l’abbé Etienne aux XIIe siècle.
Au XVIIe siècle, les voûtes d'origine qui s'étaient effondrées furent remplacées dans la nef centrale par une voûte en berceau, mais la pression qu'elle exerçait sur les murs latéraux menaçait leur stabilité. Lors de la restauration à la fin du XIXe siècle, cette voûte fut démolie et remplacée par une triple voûte d’arête, achevée en 1937.
L’intérieur de l’église se distingue par ses imposantes colonnes, ses nombreuses petites colonnes et pilastres, surmontés de 139 chapiteaux riches en symboles, ainsi que de nombreuses fresques.
Les trois absides se démarquent par le rouge des briques qui les recouvrent, et deux niches spacieuses dotées de fenêtres romanes s'ouvrent sur les côtés de l’abside centrale, surmontées d'une croix grecque enfoncée dans le mur.
Aujourd’hui, la basilique abrite dix des seize sarcophages de pierre contenant les dépouilles des princes de la famille de Savoie, transférées le 25 octobre 1836 de la Cathédrale de Turin, et confiées avec le monastère par le roi Charles Albert aux religieux Rosminiens « pour conservation ».
LES CONSTRUCTIONS ANNEXES
L’abbaye constitue le cœur de l’édifice. Au fil du temps, la Nouvelle Église et le Nouveau Monastère ont été ajoutés, ainsi que la Tour de la Bell’Alda, haute de 20 mètres, qui surplombe le précipice.
Le côté nord-ouest de la montagne est occupé par les ruines du Nouveau Monastère, édifié entre le XIIe et le XIVe siècle. Ce grand bâtiment de cinq étages a été ravagé par des tremblements de terre, des guerres et l'abandon des lieux. Des travaux de restauration, de conservation et d’accessibilité ont été réalisés dans cette zone des « ruines » entre 1999 et 2002.
Une petite maison, construite à la fin des années 1800, est visible au milieu des ruines du Nouveau Monastère. Elle a servi de station pour le Génie Militaire, permettant la transmission de messages et la communication entre Turin et les forts militaires de la Triple Alliance.
De là-haut, la vue sur la vallée de Suse est tout simplement spectaculaire.
LA LÉGENDE DE LA BELL'ALDA
La légende raconte qu'à une époque de tensions politiques intenses, la Sacra se transforma en une forteresse où les habitants de la vallée cherchaient refuge lors des raids ennemis. Au cours d'une de ces attaques, une jeune fille nommée Alda fut poursuivie par un groupe de soldats. Pour échapper à ses poursuivants et préserver sa pureté, elle s'élança du haut de la tour. Pendant sa chute, deux anges apparurent et la rattrapèrent, la déposant saine et sauve sur le sol.
Alda raconta à tous son incroyable histoire, mais personne ne la crut. Par orgueil, elle décida de retourner à la tour du monastère et se jeta à nouveau dans le vide. Malheureusement, cette fois-ci, aucun ange ne vint à son secours. La belle Alda trouva la mort en s'écrasant au fond du précipice. Selon la légende, il ne resta d'elle qu'un petit morceau de son oreille.
LA LÉGENDE DE L'ARCHANGE MICHEL
Vers l'an 980, l'ermite Giovanni Vincenzo, s'installa au col de la Cella, sur le Monte Caprasio, en face du mont Pirchiriano. Au cours d'une nuit, l'archange saint Michel lui apparut et lui ordonna de reconstruire l'oratoire situé sur le mont Pirchiriano, où il s’était établi et avait été consacré par l'évêque de Turin, Amizon (989-998). L'archange Michel serait également apparu à Hugon de Montboissier, qui prit en charge la poursuite des travaux de construction de l'abbaye pendant sept ans pour expier ses péchés. Il édifia alors le monastère autour de l'église, qui fut par la suite confiée aux Bénédictins.
Sur la roche entre le monastère et l'église, une statue en bronze de saint Michel l'Archange a été réalisée en 2005 par le sculpteur Paul Moroder.